UNISPACE-III - Vienne - Autriche

Space Festival 99 - 19-30 juillet 1999

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Initiation Elémentaire à la Télédétection Spatiale

L'Atelier SpotKite

par

Guy Pignolet (1), Gérard Clément (2), Andras Muntag (3)

 

Résumé

L'observation de la Terre et la télédétection par satellite font partie des applications spatiales les plus utiles à l'Humanité. Il est possible d'en comprendre les principes élémentaires en utilisant des moyens simples. Dans la meilleure tradition de l'éducation expérimentale, une nouvelle forme d'atelier pédagogique, pour les écoles et pour les associations scientifiques, a été mise au point au Space Festival'99 dans l'environnement international de la Conférence Unispace-III. Elle est désormais proposée aux enseignants et aux animateurs de tous les pays de la troisième planète du Système Solaire : des cerfs-volants peuvent être construits sans difficulté pour emporter des petits appareils photo numériques à une certaine altitude, et les images peuvent être traitées sur des ordinateurs personnels, avec des logiciels couramment disponibles. Il est ainsi possible, en jouant, de découvrir toutes les étapes fondamentales de l'observation de la Terre par satellite.

1 - Introduction

Un objectif majeur de UNISPACE-III était de susciter une meilleure compréhension des technologies spatiales, et leur utilisation pour stimuler à la fois l'économie et le développement social, en particulier dans les pays en voie d'émergence.

L'observation de la Terre depuis l'espace est particulièrement importante à cet égard. L'atelier SpotKite, premier du genre, avait pour objet de sensibiliser les jeunes de manière concrète au possibilités et aux avantages de la télédétection par satellite.

SpotKite et les équipes hongroises,

avec l'astronaute Franklin Chang-Diaz

2 - Le Space Festival'99 et l'atelier SpotKite

Le Space Festival'99 a été organisé dans le cadre de la Conférence UNISPACE-III pour y faire la démonstration de l'importance des activités pédagogiques expérimentales pour la sensibilisation et l'éducation du grand public aux technologies de l'espace.

Pendant une semaine, plus d'une centaine de jeunes de sept pays différents ont construit et lancé des fusées, présenté des maquettes de systèmes spatiaux, et se sont essayés au traitement des images dans le cadre de l'atelier SpotKite, l'une activités du Space Festival'99.

Premier du genre, l'atelier SpotKite vise à développer une meilleure compréhension de la séquence des moyens et des procédés qui sont mis en oeuvre dans la télédétection spatiale : des cerfs-volants et des appareils photo numériques sont utilisés pour simuler le travail des satellites d'observation de la Terre, et des méthodes de traitement simples sont utilisées pour découvrir comment des informations utiles peuvent être extraites des images spatiales.

Quatre équipes, deux de Hongrie, une d'Allemagne et une d'Angleterre, ont participé à l'atelier SpotKite. Pour commencer, la technologie des cerfs-volants a été expliquée, avec démonstration pratique, par Gérard Clément. Les méthodes élémentaires de traitement des images ont été présentées par Guy Pignolet, et des indications sur la manière de mettre en évidence des informations utiles ont été données par Andras Muntag. Ensuite, les cerfs-volants ont volé, et des images ont été prises par les participants sur le terrain de la caserne Dabsch à Korneuburg, une petite ville au nord de Vienne. La pluie et une mauvaise météo n'ont pas permis l'utilisation des cerfs-volants dans de bonnes conditions au Parc du Danube près de la Cité de l'ONU à Vienne, mais les images prises à Korneuburg ont été utilisées pour montrer des traitements d'images simples sur le stand du Space Festival à l'Exposition de UNISPACE-III les 22 et 23 juillet 1999. Toutes les équipes ont fait des présentations remarquables, et un Prix spécial a été attribué par UNISPACE-III à l'équipe "Titan" de Hongrie pour le travail exceptionnel qu'ils ont réalisé au cour de l'atelier.

Tout du long, les équipes ont fait preuve de l'intérêt autant que du plaisir qu'elles ont prises en participant à l'atelier. Une tentative similaire avait était faite en 1992 à l'occasion de l'Année Spatiale Internationale, avec un succès mitigé en raison d'une trop grande complexité des méthodes de l'époque. En sept ans, les conditions techniques ont changé radicalement : les cerfs-volants sont devenus un art populaire, les appareils photo numériques sont devenus abordables, et la puissance des ordinateurs a proprement explosé. L'expérience SpotKite de 1999 est très positive et très réussie. Elle montre que cette méthode d'"edutainment" (une contraction des mots anglais "education" et "entertainment") a atteint la maturité suffisante pour être diffusée et utilisée dans les écoles et dans les groupes d'éducation à l'espace.

3 - La fabrication des cerfs-volants et la prise d'images

Pour la prise des images, on utilise de préférence un cerf-volant hexagonal "Rokkaku", une forme japonaise classique. Un cerf-volant de ce type avec une aire de 4 à 5 m˛ peut emporter un appareil photo à une altitude suffisante d'une centaine de mètres ou plus par vent modéré. Mais n'importe quel autre type de cerf-volant suffisamment stable peut être également faire l'affaire.

L'appareil photo ne doit pas être fixé directement sur le cerf-volant, mais attaché dans une nacelle spéciale, au bout d'une tige d'environ un mètre qui est suspendue au fil du cerf-volant à une distance de 20 à 50 mètres de celui-ci. Le but est double, d'une part parce que l'envol du cerf-volant est le moment le plus délicat de toute l'opération et qu'il vaut mieux le faire sans l'appareil photo, qui pourrait être endommagé si le cerf-volant tombait pendant cette phase critique du décollage. Il est préférable de n'attacher l'appareil qu'une fois que le cerf-volant est bien stable en l'air. D'autre part, la tige sert d'amortisseur pour les vibrations, et cela améliore la stabilité de l'appareil photo.

Aujourd'hui [1999], il existe de nombreux appareils photo numériques, certains à des prix très raisonnables, qui peuvent servir pour la prise des images. L'appareil doit être relié à un système de télécommande pour pouvoir être déclenché à partir du sol. On peut utiliser du matériel de radio-commande du même type que celui utilisé pour les modèles réduits d'avions. Dans ce cas il est même possible, avec plusieurs canaux, d'avoir un système d'orientation pour l'appareil, et de prendre des images de biais. Dans le cas contraire, l'appareil doit être fixé face au sol. On peut aussi utiliser les radio-commandes à la fois simples et bon marché que l'on trouve sur certaines petites voitures, en modifiant le récepteur pour lui permettre de déclencher l'appareil photo.

On peut également utiliser des appareils photo ordinaires légers, avec du film couleur ordinaire, que l'on peut développer et passer ensuite au scanner pour obtenir des images numériques. Cela prend plus de temps qu'avec un appareil photo numérique, mais pour les besoins de la pédagogie expérimentale, les résultats peuvent être tout aussi bons.

En prenant les images, on sera particulièrement attentif sur les questions de sécurité : il ne faut pas faire voler le cerf-volant et l'appareil photo au-dessus d'une foule, au-dessus de maisons ou à proximité d'une route où circulent des voitures, parce qu'il a toujours un risque que le vent ne vienne à manquer, ou qu'il y ait des turbulences, ce qui peut faire tomber le cerf-volant et causer des dégâts. Il ne faut pas utiliser le cerf-volant dans une zone où il y a des arbres, car pour les mêmes raisons, le cerf-volant peut tomber et se prendre dans les branches, ce qui peut rendre la récupération dangereuse. Surtout, il ne faut JAMAIS faire voler un cerf-volant près de lignes électriques, parce que si le fil du cerf-volant se prend dans les fils électriques, il y a un risque d'électrocution qui peut être mortel, pensez aux expériences de Benjamin Franklin !

 

Conférence Internationale UNISPACE-III à Vienne, en Autriche, le 20 juillet 1999 :

Préparation pour le lancement du cerf-volant Rokkaku, avec son appareil photo numérique, au cours de l'atelier SpotKite du Space Festival'99.

4 - Le traitement sur ordinateur et l'interprétation des images

Après la prise des images, celles-ci peuvent être transférées sur le disque dur d'un ordinateur au moyen des logiciels fournis avec l'appareil photo numérique, ou au moyen d'un scanner dans le cas des photos couleur sur papier.

On peut faire deux sortes d'opérations pour traiter les images : une rectification géométrique, et un traitement en fausses couleurs pour faire ressortir des caractéristiques particulières.

Si l'image n'a pas été prise exactement à la verticale, il en résulte une distorsion des formes et, par exemple, un carré sur le terrain n'aura plus tout-à-fait la forme d'un carré sur l'image, à cause des effets de perspective. Il est possible, dans une certaine mesure, de restituer les formes d'origine par de simples effets de distorsion, ou en utilisant des algorithmes mathématiques plus complexes, trouvés sous forme de logiciels tout faits, ou que l'on peut calculer soi-même en y réfléchissant, ce qui peut être une partie du plaisir que l'on y prend.

Le grand intérêt du retraitement des couleurs de l'image, c'est de permettre des combinaison autres que celles, fixées une fois pour toutes, que la nature nous permet de faire avec les cellules sensibles que nous avons sur la rétine au fond de l'oeil.. Nous pouvons distinguer trois couleurs de base, avec des sensibilités données, qui ne varient que peu d'un individu à l'autre (sauf dans le cas des daltoniens...). En utilisant un logiciel graphique, on peut modifier les proportions des combinaisons des différentes couleurs de base, et également la dynamique de chacune de ces trois couleurs, ce qui veut dire qu'on peut étaler des petites variations d'intensité sur une plage de valeurs beaucoup plus large. Des manipulations sélectives des couleurs d'origine peuvent faciliter la mise en évidence de caractéristiques particulières de l'image bien mieux que ce que ne permet la vision "naturelle" avec les couleurs d'origine.

Une même image peut être traitée de plusieurs différentes manières pour mettre en évidence des détails ou des formes de nature différente, ce qui en facilite l'interprétation. C'est en cela que consistent les opérations élémentaires de la télédétection, dans l'utilisation qu'en font les professionnels pour traiter les images prises à partir d'avions et, maintenant, depuis les satellites en orbite autour de la Terre.

 

 

Présentation composite par l'équipe SpotKite "TITAN" de Budapest, en Hongrie

Koknya Peter, Koves Attila, Muntag Marton, Sas Balazs

Premier Prix SpotKite - Space Festival'99

Il y a quatre images : la photo originale "brute", une photo rectifiée, et deux images en "fausses couleurs"

La première image (orig.pcx) montre une route et son environnement : voie goudronnée, chemin non clôturé, végétation avec des plantations et différentes herbes. La photo est en perspective, il y a des déformations, et il y a des différences importantes qui ne sont pas très apparentes (types de plantes, relief, trous du terrain..).

La deuxième image (torz.pcx) montre le résultat de la rectification : les bords de la route ont été redressés.

Sur la troisième image (color1.pcx) on peut voir les différents types d'herbage dans le coin inférieur droit, et même deux trous (en vert), que l'on voit à peine sur la photo d'origine.

Dans la quatrième image (color2.pcx), le contraste est visible entre le côté éclairé et le côté à l'ombre des arbres en haut à gauche. Avec les fausses couleurs, on peut mettre les rangées d'arbres bien en évidence.

5 - Conclusion : vous pouvez le faire aussi !

Cet atelier que nous avons fait au Space Festival'99 illustre de manière très simple les possibilités offertes par les satellites d'observation de la Terre. On peut en faire une activité scolaire dans les écoles primaires et secondaires pour des jeunes de 8 à 18 ans. Vous-même, vous pouvez le faire !

Quand un satellite regarde la Terre, il peut servir pour les problèmes de communication, faire de la géodésie et de la localisation, et il peut enregistrer des images pour les besoins de la météo, de la géographie et de l'occupation des sols. On peut modéliser cette dernière application avec des moyens simples.

Tout ce dont on a besoin est d'un cerf-volant qui porte un appareil photo, comme indiqué ci-dessus, et d'un ordinateur avec un logiciel approprié pour traiter les images. On peut construire facilement les cerfs-volants, les écoles ont des ordinateurs, et aujourd'hui, il n'est pas difficile de trouver des logiciels pour les besoins pédagogiques. Quant aux systèmes de télécommande, on les trouve pour pas cher dans certaines petites voitures radio-commandées.

Quand on veut faire un atelier similaire, il faut en expliquer aux enfants toutes les étapes, comme cela a été fait dans ce document. Il faut aussi s'occuper de faire les cerfs-volants et d'installer les logiciels. Il faut tenir compte de l'âge des enfants et de leur niveau de connaissances en physique et en informatique. Quand on explique le vol du cerf-volant, il n'est pas toujours indispensable de parler des forces et de la composition des vecteurs, mais dans les classes les plus grandes, cela peut être utile.

Quand on travaille avec les enfants, il faut penser qu'ils auront des tas de questions pendant l'atelier. Il faut les laisser parler de ce qui les intéresse. Mais ils auront des questions qui ne seront pas directement liées à notre sujet : il faut les contrôler pour leur éviter de se disperser. Ils voudront essayer tout ce dont parle l'animateur. Laissons-les faire leurs expériences, en les prévenant de ce qui va se passer.

La tâche de l'enseignant n'est pas seulement de montrer et d'expliquer le sujet. Il doit aussi anticiper les questions des enfants et penser avec leur cerveau. Il doit connaître les limites qui lui permettent de maintenir les réponses dans la bonne direction. Et enfin, il doit utiliser cette expérience particulière pour enseigner des connaissances et des conduites de portée générale.

Votre tâche est d'essayer d'insuffler aux enfants des connaissances indélébiles et des impressions qu'ils garderont pendant toute leur vie.

C'est ce qui a été fait l'atelier SpotKite du Space Festival'99. Vous pouvez le faire aussi.

6 - Remerciements et contacts.

Nous voudrions remercier le Dr. Ing. Hans von Muldau, qui nous a ouvert la possibilité de réaliser l'atelier SpotKite au Space Festival'99, remercier le CNES qui a fourni la logistique et les ordinateurs, et remercier l'Armée Autrichienne qui a offert le cadre de travail. Et remercier l'astronaute Franklin Chang-Diaz pour ses encouragements aux équipes de SpotKite.

Pour plus de renseignements sur la manière de construire et de faire voler les cerfs-volants, on peut s'adresser directement à Gérard Clément de "Vent d'Est - Vent d'Ouest". Sur la manière d'utiliser les images, on peut s'adresser directement à Andras Muntag en Hongrie. Pour des présentations ou des conférences sur les activités spatiales futures et sur ce qu'elles apporteront à l'Humanité, on peut s'adresser directement à Guy Pignolet au CNES.

Une note technique "SpotKite" de 5 pages a été distribuée à l'occasion du Space Festival à Unispace-III. Elle est disponible en anglais, en français et en allemand. Elle donne, avec des exemples particuliers, des indications sur la préparation d'un appareil photo numérique pour l'utiliser avec une radio-commande (ici un Konica Q-Mini), et sur l'emploi d'un logiciel de dessin (ici le logiciel PhotoPaint Corel-4 pour PC). La note technique est disponible en bas de page; elle peut aussi être envoyée par e-mail ou sous forme papier.

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(1) CNES Communication, 2 place Maurice Quentin, 75039 Paris Cedex 01, France - email : guy.pignolet@cnes.fr

(2) Vent d'Est - Vent d'Ouest, 7 rue de Prague, 75012 Paris, France - Tel +33 1 44 68 01 86 / Fax +33 1 44 68 03 86

(3) Lutheran Secondary School, Városligeti Fasor 17-21, Budapest 1071, Hungary - email : muntaga@kvi.ktm.hu


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